Hollande : "Un PS faible, et c'est toute la gauche qui souffre"

Publié le par PRG

Le Monde le 27 juin

Dans un chat avec les internautes du Monde.fr, François Hollande, ancien premier secrétaire du Parti socialiste, défend son bilan et l'ouverture au centre-gauche. Il refuse toute dissolution ou changement de nom du parti et se montre sceptique sur l'idée de primaires ouvertes pour la désignation du candidat à la présidentielle.

LeCornichonMasque : Que pensez-vous de l'arrivée de
Frédéric Mitterrand au ministère de la culture ?

François Hollande : Je veux croire que Frédéric Mitterrand a été nommé ministre de la culture pour ses qualités. Pour son parcours, et non pour le nom qu'il porte. Ce serait désagréable pour lui d'imaginer que
Nicolas Sarkozy ait voulu par cette entrée au gouvernement faire un coup politique.

Nicoz : Que pensez-vous de la suppression du secrétariat d'État aux droits de l'homme ?


François Hollande : C'est un symbole. C'en était un quand il a été créé, c'en est un quand il est supprimé. De la même manière, j'ai été surpris, pour ne pas dire choqué, que le président de la République justement dans son discours à Versailles, moment solennel s'il en fut, n'ait pas parlé de la situation en Iran, de la répression des manifestants et des manquements aux droits de l'homme.

Et puisque Bernard Kouchner considérait ce secrétariat d'Etat superflu, qu'il montre plus de courage pour porter les droits de l'homme partout dans le monde. Et notamment là où, jusqu'à présent, lui-même est resté jusqu'à présent silencieux, voire complaisant. Que ce soit en Chine, en Russie, et surtout en Afrique.

nv : Après le récent Congrès du Parlement – et son coût, en pleine crise – estimez-vous que les parlementaires socialistes auraient dû être plus fermes et vindicatifs lors du vote de la révision constitutionnelle ?

François Hollande : Moi je l'ai été, et j'ai tout fait pour que cette révision constitutionnelle ne soit pas votée. Parce que je considérais que son seul objet était de permettre à Nicolas Sarkozy de venir s'adresser au Parlement et qu'il y avait là plus qu'une prétention personnelle, un changement dans nos institutions. C'est-à-dire l'effacement du premier ministre, et la soumission du Parlement.

J'ai donc profondément regretté que des radicaux de gauche et même un socialiste aient pu voter cette dangereuse réforme. Et j'ai encore davantage déploré qu'au lendemain de l'adoption de la révision l'an dernier, il y en ait eu à gauche pour nous faire le reproche de notre attitude d'opposition à ce moment-là.

place : Faut-il dissoudre le Parti socialiste ?

François Hollande : Je ne vois pas pourquoi il mériterait ce sort funeste. Au contraire, il faut le ressouder, le ressourcer, le renouveler et le rassembler.

Michel : Faut-il changer le nom du Parti socialiste ?

François Hollande :
Je me suis toujours étonné que certains, y compris des éminences, en fassent la proposition. Quand un parti a l'honneur de porter ce nom depuis plus d'un siècle, et qu'il s'est battu pour l'égalité, le progrès, l'émancipation humaine, qu'il s'est identifié à des changements profonds, je ne considère pas qu'il a terminé sa tâche.

Car tant qu'il existera une atteinte à la dignité humaine, un manquement à l'égalité, un capitalisme prédateur, et une volonté démocratique pour le dominer, il y aura toujours des hommes et des femmes qui se lèveront. On les appellera des socialistes.

sophie saramito : Une partie du problème du Parti socialiste est incontestablement son ambiguité permanente sur des grands sujets de société. Par exemple, pouvez-vous donner la position claire et les propositions du parti sur des dossiers comme les retraites, la fiscalité ou la réforme des collectivités ?

François Hollande :
Oui, je le peux. Sur les retraites, l'allongement de la vie, qui est un progrès pour l'humanité, obligera à travailler différemment, et sans doute plus longtemps.  Encore faut-il tenir compte de la pénibilité des métiers, de l'âge d'entrée dans la vie active et de la période de chômage.  Il faut aussi changer le comportement des entreprises en matière d'emploi des seniors.

Sur la fiscalité, je suis avec le Parti socialiste pour la remise en cause des avantages fiscaux qui ont été accordés depuis deux ans aux plus favorisés. Je suis pour le retour à une progressivité de l'impôt sur le revenu, à une assiette plus large que le seul travail pour le financement de la Sécurité sociale, et pour une refonte totale de la fiscalité locale en prenant le critère du revenu et non celui de la taille de l'habitation.

Sur l'organisation territoriale, je suis pour la clarification des compétences entre les collectivités (région et département) et un mode de scrutin qui soit le même pour tous les niveaux d'administration, c'est-à-dire la proportionnelle avec une prime majoritaire, qui permet la représentation de la diversité des sensibilités et la stabilité des assemblées. C'est le mode de scrutin communal des villes de plus de trois mille cinq cents habitants.

adrien : N'êtes-vous pas responsable de la situation du Parti socialiste aujourd'hui ? En ayant toujours choisi la synthèse, le consensus mou et le rassemblement à contre cœur, n'avez-vous pas empêché le parti d'évoluer ?

François Hollande : La synthèse n'est pas le consensus, mou ou dur. C'est la capacité qu'a un parti de porter une ligne commune.  Et ceux qui ont pensé que la division, l'affrontement, la compétition et l'irrespect du vote militant étaient la bonne démarche doivent constater depuis quelques mois qu'il vaut finalement mieux être unis autour d'un projet partagé.

Bénard : Vous avez dirigé le PS durant une bonne décennie. Le K.-O. debout du PS semble découler de votre mandat. Pensez-vous que vous pourrez un jour prétendre à la candidature pour la présidentielle ?

François Hollande : D'abord, lorsque j'ai quitté le Parti socialiste, c'était sur une victoire. Celle des municipales et cantonales de mars 2008. Ensuite, je ne me place pas dans la proclamation pour l'échéance présidentielle. Une candidature n'a de sens que si elle permet de gagner et de réussir ensuite. Nous n'en sommes pas là.

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