Un mode de scrutin conçu pour amortir les chocs sur les grandes formations

Publié le par PRG

Le Monde le 9 Avril 2009
En 1994, Michel Rocard, chef de file de la liste du PS, en a été l'une des grands victimes. Concurrencé, notamment par une liste des radicaux de gauche conduite par Bernard Tapie (12 %), du PCF (7 %), des Verts (3 %), des chevènementistes (2,5 %), il a obtenu à peine 14,5 % des suffrages, loin derrière la liste de droite menée par Dominique Baudis (25,5 %), bien que celle-ci ait eu à subir la concurrence de Philippe de Villiers (12,3 %). Michel Rocard dut alors quitter son poste de premier secrétaire du PS et renoncer à ses ambitions présidentielles.

Pour Nicolas Sarkozy, qui dut conduire en catastrophe la liste RPR-DL en 1999 parce que Philippe Séguin avait déclaré forfait, la débandade fut encore pire. Avec moins de 13 % des voix, il se trouva devancé à la fois par la liste socialiste de François Hollande (22 %) et celle, souverainiste, de Charles Pasqua (13 %). Il dut aussi renoncer à la présidence du RPR.

Ces mauvais souvenirs ont conduit le gouvernement Raffarin, après la réélection de Jacques Chirac en 2002, à modifier le mode de scrutin pour les élections européennes suivantes. Pour limiter les effets du "vote sanction", qualifié de "vote défouloir", il fut alors décidé de procéder à un découpage de la circonscription nationale unique en huit "grandes circonscriptions interrégionales".

 

DIFFICULTÉ DE COMPOSITION

 

Double avantage de ce morcellement : il rend plus difficile une lecture "nationale" des résultats et relève, de fait, le seuil minimum nécessaire pour obtenir un élu, même si celui-ci reste théoriquement fixé à 5 % des suffrages exprimés. Ainsi, s'agissant des circonscriptions d'Ile-de-France ou du Sud-Est dotées du plus grand nombre de sièges (13), il faudra en 2009 obtenir au minimum 7,7 % des voix pour espérer avoir un élu.

Lors de l'examen du projet de loi au Parlement, les représentants du gouvernement et de la majorité ne manquèrent pas d'arguments pour justifier ce changement. L'objectif de la réforme, expliquaient-ils, était de "rapprocher les élus européens de leurs électeurs", de leur "donner un visage", tout en évitant l'"émiettement" de la représentation française au Parlement européen. A l'expérience, cette régionalisation s'avère difficile car les partis sont obligés d'arbitrer entre la compétence européenne des élus et la représentation des régions et des départements. C'est ainsi par exemple qu'Alain Lamassoure, reconnu comme l'un des meilleurs eurodéputés n'a pour le moment guère obtenu de place éligible sur la liste UMP du Sud- Ouest. Il a dû laisser sa place à Dominique Baudis, issu de la même région mais jugé plus médiatique.

La difficulté de composition des listes tient aussi au fait que le parti dominant doit faire de la place à ses alliés s'il veut éviter des listes dissidentes. L'UMP s'est ainsi engagé à faire de la place au Nouveau Centre d'Hervé Morin, aux progressistes d'Eric Besson et à la gauche moderne de Jean-Marie Bockel.

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