Bayrou au Tapie

Publié le par PRG

Par Lilian Massoulier Agoravox - Mercredi 10 septembre, 15h22
Cet article a été rédigé par un reporter d'AgoraVox, le journal média citoyen qui vous donne la parole.

Remarquable saillie de l’ancien ministre de la Ville, ancien président de l’OM, ancien chanteur, ancien chef d’entreprise, ancien acteur, Bernard Tapie, lucide et offensif contre l’ancien candidat ancien UDF, ancien centriste, ancienne alternative, François Bayrou, insupportable père la morale du microcosme politique actuel.

Tapie chez Aphatie n’a pas mâché ses mots à l’encontre de Bayrou. Il a fustigé l’importance démesurée que les médias accordent à ce personnage de seconde zone, qui ne représente rien, selon Tapie, un parti de deux députés, une succession de défaites aux dernières élections et qui n’en est pas, pour citer Tapie toujours, « à une connerie près ». On ne saurait mieux dire. On ne saurait mieux situer l’imposture Bayrou, un homme de second plan, un temps pressenti pour brouiller les cartes, et qui depuis n’a cessé de se ramasser, trop bouffi d’orgueil, de vanité, de suffisance et d’ambition personnelle. Bayrou lâché par tous ses anciens compagnons, les uns après les autres découragés, dégoûtés ou déboussolés par l’insistance du personnage à ne vouloir qu’une seule chose, que le pouvoir suprême, que la magistrature première.

Tapie a bien eu raison de soulever le problème de l’hyper-présence bayrouiste dans les médias qui ne correspond en rien à l’importance du bonhomme et de son parti sur l’échiquier politique : Bayrou, on en parle tous les jours. On en parle quand Jean-François Kahn, journaleux hystérique en retard de deux guerres, le rejoint, on en parle quand Peyrelevade, ancien fer de lance du pire Crédit lyonnais, le rejoint, on en parle quand il propose aux socialistes de le rejoindre, on en parle quand la plupart des socialises, sauf Ségolène Royal évidemment, déclinent fortement son invitation.

Et on en parle encore pour parler d’Edvige, faux scandale, fichier vieux comme le monde, qui ne change rien aux libertés individuelles, mais qui excite les bobos ou les ligues de défense des droits des hommes, femmes, bi, trans, gays ou lesbiennes qui n’ont que ça à faire, s’indigner en faisant croire que, si leur droit à la liberté est menacé, alors le pays entier est en péril. On lit beaucoup de Bayrou sur le sujet, et beaucoup de Bayrou sur Sarkozy, et ses dérives princières, pour ne pas répéter le « monarchique » de Kahn ou de Joffrin, princières ça fait mieux. Le fait du prince sur la villa de Clavier en Corse, le fait du prince sur l’indemnisation de Tapie sur le Lyonnais. Sur tout, tout le temps, on écoute Bayrou, une sorte de mini Dalaï-Lama, peu sacré, mais très bigot, comme si sa parole valait sagesse, comme si seule cette parole pouvait nous éclairer. N’importe quoi, bien sûr, et Tapie a raison de le souligner. Et Tapie est un peu le seul à le souligner avec autant de force. Avec sa force à lui, tout en gouaille et sans mesure. Tapie bien placé pour juger l’homme du MoDem : entre imposteurs, on se comprend.

Parce que Bayrou, évidemment, est un imposteur : un faux renouveau politique qui n’a en tête qu’une seule chose, qu’un seul fauteuil, qui aujourd’hui déjà, comme Royal autre perdante perpétuelle, ne pense qu’à 2012, son obsession, son mantra. Bayrou ne propose rien, mais n’oppose rien non plus : de toute façon il n’a aucune force à opposer Bayrou, que de s’illusionner sur ses flatteurs pourcentages du premier tour de la présidentielle, soufflé depuis retombé aux oubliettes. François Bayrou n’est rien, qu’un arriviste sans doute, mais il est tellement partout qu’on finit par penser que l’homme a son importance. Pourtant non. Le MoDem n’est que la risée de la droite et l’embarras d’une gauche minoritaire. Pas demain que le PS penchera de ce côté-là, pas demain non plus que Besancennot, plus moderne, habile, futé et percutant que le Béarnais, écoutera ne serait-ce que d’une oreille les sérénades de ce faux centre, fausse sociale démocratie.

Pour réussir en politique, le cynisme s’impose. Mitterrand l’avait compris, Sarkozy aussi, qui l’a doublé de vulgarité. Bayrou, lui, n’est pas cynique, il est mesquin. Il n’arrivera donc à rien. S’opposer à Sarkozy, à Tapie, prouve à quel point il n’a rien compris sur les ingrédients nécessaires au brouet élyséen. Mitterrand, bien plus intelligent, ambigu et calculateur, fasciné par l’outrance de Tapie, l’avait fait ministre de la Ville : un chef-d’œuvre politique aujourd’hui encore inégalé, consistant à enfoncer la gauche en paralysant la droite. Tapie ministre de la Ville : comment faire mieux ? Mitterrand n’en avait rien à fiche de la morale, alors que Bayrou, lui, s’en drape dès qu’il le peut, pour gagner quelques points, arracher quelques sanglots au bon peuple, flatter son bon sens comme on tape le cul d’une vache. Mitterrand se moquait de la morale comme des libertés individuelles d’ailleurs, de l’Elysée il avait déployé son Edvige personnel, sans demander son avis aux nitouches médiatiques. Bayrou lui se précipite devant les caméras et les micros dès qu’il le peut pour balancer sa bonne parole, homélie répétitive et vaine qui ne convainc que les indécis.

Plutôt Tapie que Bayrou, évidemment : entre un voyou qui s’assume et un jaloux qui s’invite il n’y a pas photo. Mieux vaut un Tapie de nouveau riche qu’un Bayrou au pouvoir. Mais Bayrou au pouvoir, c’est vrai, ce n’est pas demain la veille, Tapie est même capable de se présenter contre lui ! Millionnaire, ça change une vie. 

Publié dans Article

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article