PS : la motion Sarkozy

Publié le par PRG

Le Figaro le 3 novembre 2008
C'est la motion cachée du congrès de Reims. Appelons-la la «motion Sarkozy». Elle n'existe pas, mais ces temps-ci, sa petite musique sonne agréablement aux oreilles des militants socialistes. À Reims, sur le papier, elle aurait de nombreux atouts à faire valoir : retour de l'État, condamnation du capitalisme financier, création d'un fonds souverain, appel à un gouvernement économique européen, volontarisme, interventionnisme. Tonnerre d'applaudissements assuré !

Nul besoin d'une interminable «nuit des résolutions», on parviendrait à la synthèse en deux temps, trois mouvements et on repartirait contents en se disant que Jean Jaurès et Léon Blum seraient fiers !

Mais Nicolas Sarkozy n'est pas candidat au poste de premier secrétaire, et en plus il n'est pas socialiste. Parce que la situation est exceptionnelle, il prend des mesures exceptionnelles, mais sa vision à long terme n'est pas celle d'une société où l'État régirait tout, durablement et systématiquement.

C'est le danger qui guette les signataires des motions de Reims. Pousser le curseur plus à gauche, confusément et par opportunisme, parce que Nicolas Sarkozy a pris pied sur leurs terres. Et donner, une nouvelle fois, de fausses illusions au «peuple de gauche», qui s'y connaît en déceptions et en amertumes.

À ce jeu-là, Benoît Hamon a pris quelques longueurs d'avance. Mais Martine Aubry n'est pas en reste. Elle sait que les congrès socialistes, c'est d'abord une question de posture, où il est plutôt conseillé de malmener le principe de réalité. Alors, on la sent prête à en faire beaucoup à la tribune de Reims, et d'abord contre le chef de l'État. Prête aussi à justifier son alliance baroque avec Laurent Fabius et à ironiser sur Bertrand Delanoë qui, dans une fâcheuse erreur de timing, avait jugé opportun, en juin dernier, de s'appliquer à lui-même le qualificatif de «libéral».

Que n'avait-il pas dit ! Depuis, le maire de Paris, présenté comme le favori, s'est «justifié» auprès de ses camarades, mais chacun sent bien que le mot qui fâche pourrait faire la différence en sa défaveur.Et puis, il y a Ségolène Royal. Où est-elle ? Personne ne sait très bien. Elle était un peu à droite du PS, mais ces derniers jours, lorsqu'il s'agit de s'attaquer à Nicolas Sarkozy, à sa prétendue «connivence» avec les banquiers, elle sait doubler ses amis sur leur gauche. Comme Aubry et Delanoë, elle peaufine ses arguments pour prouver qu'elle est à des années-lumière de la nouvelle politique voulue par le chef de l'État. Bref, Nicolas Sarkozy risque d'être l'acteur principal du congrès de Reims. Le phénomène n'est pas nouveau. Depuis son élection, il hante et malmène le vieux parti d'Épinay, l'obligeant à s'adapter tant bien que mal à l'évolution du monde. La crise financière aurait pu donner un nouvel espace au PS, mais Nicolas Sarkozy s'y est installé. Depuis, les camarades retravaillent leur motion.

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